Lettre ouverte à celles et ceux qui pratiquent un mode d’écriture qu’ils revendiquent comme inclusif

On 18 juin 2018 by dom

Le mode d’écriture qui se revendique « inclusif » rend difficile la lecture pour tous, mais surtout il exclut de nombreuses personnes, notamment un bon nombre de personnes handicapées. En fait appeler cela « écriture inclusive » constitue un contresens. J’ai rédigé cette lettre ouverte car j’aimerais qu’on comprenne bien les barrières que ce mode d’écriture dresse, créant un handicap supplémentaire pour de nombreuses personnes. Il existe une alternative l’emploi simultané des mots féminins et masculins : lectrices et lecteurs au lieu de lect.rice.eur.s, c’est trop simple ?

Lire la lettre ouverte:
* Version PDF : LettreOuverteEcritureDiteInclusive.pdf
* Version HTML : http://chezdom.net/lettre-ouverte-ecriture-inclusive-version-html/

Si vous partagez mon avis sur la question, n’hésitez pas à diffuser.

EDIT

Une petite précision
L’objet de ce texte n’est pas de dire qu’il ne faut pas écrire inclusif, mais que les formes en « -e-s » ou « .e.s », quelle que soit la hauteur du point, n’ont rien d’inclusif. Je n’ai rien contre les formes d’écriture qui sont oralisables (que ce soit « toutes et tous », ou « toustes », ou n’importe quelle forme qui peut se prononcer comme elle s’écrit) et qui n’ont aucune raison pratique de poser de problème particulier du fait de leur forme. Il y a plein de moyens d’écrire de façon réellement inclusive, c’est à dire sans exclure une autre partie de la population. Utilisons les plutôt que de s’acharner à rendre les textes le plus illisibles possible.

5 Responses to “Lettre ouverte à celles et ceux qui pratiquent un mode d’écriture qu’ils revendiquent comme inclusif”

  • Bonjour,

    Tout d’abord je voudrais vous remercier pour ce texte qui souligne plusieurs points rarement débattu au sujet de l’écriture inclusive. Cependant, je me permettrai d’y opposer les remarques suivantes :

    – vous parlez très justement des logiciels de synthèse vocales pour les personnes aveugles, en soulignant que de tels logiciels sont inopérants sur les formes de type « -e ». Outre l’argument que vous y opposez vous-même en fin de texte (à savoir que la technologie pourrait très bien s’adapter pour permettre une synthèse vocale adéquate), il est à noter que de plus en plus de formes sans « -e », sans point médian, existent. On rencontre parfois par exemple des « lecteurice », des « copaines » ou le désormais assez classique pronom « iel ». Bien que l’écriture inclusive ne dispose pas d’une Académie Française pour en stabiliser la forme ni d’une Éducation Nationale pour en répandre le bon usage, j’ai l’impression que ce genre de formes, qui tiennent plus du néologisme que de la féminisation classique, tendent à prendre le dessus lorsqu’elles existent. Nos oreilles et nos yeux sont accoutumés, depuis notre naissance, à ce qu’il n’y ait qu’un bon usage et que celui-ci soit assez stable dans le temps : n’oublions pas que la vie naturelle d’une langue est d’évoluer constamment, et que nous sommes les acteurices de cette évolution, nous avons la possibilité de choisir des formes épicènes qui seront plus oralisables et vocalisables par des logiciels. Et l’accessibilité des textes aux personnes aveugles est un excellent argument pour cela.

    – Au sujet des outils de grossissement de texte pour les personnes malvoyantes, j’ai du mal à comprendre votre position en faveur des formes types « étudiants et étudiantes » au lieu du plus court « étudiant-e-s ». Il me semble en effet que la deuxième forme est plus rapide à lire.

    – Enfin, vous évoquez très justement le sujet des personnes apprenant le français (voir l’écriture) à leur arrivée en France, et des personnes ayant grandi en France mais maîtrisant mal la lecture et l’écriture. J’ai donné pendant quelques temps des cours d’alphabétisation à des adultes, et un constat s’impose : ni votre texte ni ma réponse ne sont compréhensibles en-dessous d’un niveau de lecture qui correspond au moins à celui d’un-e lycéen-ne moyen-ne. Il est évident qu’une partie de la population ne peut pas les lire. Est-ce pour autant qu’il faut supprimer votre lettre ouverte ? Non. Une grosse majorité des textes en écriture inclusive ne seraient pas, même sans « -e-« , accessibles à l’ensemble de la population. Le problème n’est pas tant l’existence de textes compliqués que le manque de développement des textes en français simplifié. Rendre accessible, c’est construire des rampes, pas faire sauter les escaliers…

    Merci encore pour votre texte qui a le mérite d’introduire un débat intéressant !

    • Bonjour et merci pour vos commentaires

      Je précise d’abord que je n’ai rien contre l’idée d’écrire de façon inclusive, mais que les formes en « -e-s » ou « .e.s », quelque soit la hauteur du point, n’ont rien d’inclusif.

      Je n’ai rien contre les formes d’écriture qui sont oralisables. Car elles ne vont pas poser de problème : ni aux personnes utilisant une synthèse vocale, ni aux personnes avec dyslexie.

      Je dis effectivement qu’on peut probablement développer un outil pour supprimer les « -e-s », mais que cela me paraît en totale contradiction avec l’idée d’inclusion.

      Pour la question des textes agrandis, la lecture est un processus complexe, qui ne se fait pas « lettre à lettre », mais qui est beaucoup basé sur la prédiction. L’utilisation de signes de ponctuation à l’intérieur des mots est très gênant dans ce processus, pour beaucoup de monde (y compris des gens qui ne sont pas malvoyants). On pourra toujours trouver des exemples de gens qui s’en sortent très bien mais la totalité des retours que j’ai de personnes malvoyantes est que cela les gêne énormément.

      A propos du facile à lire, on travaille beaucoup en ce moment sur le FALC (facile à lire et à comprendre). Mais ce n’est pas la question (la mienne en tous cas), si on veut une écriture inclusive, elle se doit de l’être réellement, inclusive, quel que soit le niveau de lecture. Il me semble qu’il y a d’autres moyens, oralisables et sans symboles intempestifs, qui permettent de le faire. Mon propos est juste de militer pour ces moyens là, et d’expliquer pourquoi il faudrait – à mon sens – arrêter d’utiliser des formes qui rendent les textes illisibles (c’est incroyable d’ailleurs le nombre de personnes qui m’ont dit, depuis que je réfléchis sur ce sujet, que sans problème de handicap et avec un niveau académique élevé, qu’elles sont très gênées par l’écriture utilisant les tirets ou les points, et ce ne sont pas spécialement de méchants ou de méchantes anti-féministes).

      Bien à vous et merci encore pour votre commentaire.

  • MeMerci Dominique de cet excellent article. Tu pourrais ajouter les sourds, car beaucoup d’entre eux ont quelques difficultés avec le français et la lecture. Je trouve que l’écriture inclusive est une aberration, et que c’est vraiment une lutte d’arrière garde pour l’égalité homme femme. Il est tellement plus important que les femmes gagnent autant que les hommes, qu’elles se voient confier autant de responsabilités que les hommes. Le temps passer à essayer de faire adopter l’écriture inclusive est autant de temps perdu pour la cause des femmes, qui méritent mieux que cela — du reste la grande majorité des femmes comme de la population ne souhaite pas voir s’imposer l’écriture inclusive. Et effectivement rendre encore plus difficile d’accès la lecture à bien des personnes (dont des femmes 😉 ne me semble pas une bonne idée.

  • Les textes en français peuvent déjà contenir des acronymes, des abrévations, de la nov-langue, des expressions en langue étrangère, toutes choses ennuyeuses pour celles et ceux qui apprennent le français, et pour les logiciels de traduction à destination des mal-voyants.
    L’écriture inclusive est encore balbutiante.
    La question peut paraître secondaire, cela ne donne toujours pas à travail égal salaire égal. Le livre “L’académie française contre la langue française”, d’Eliane Viennot et d’autres, livre un peu désordonné mais qui a le mérite d’exister, donne à réfléchir, et au delà de la simple écriture inclusive.
    C’était en gros ma modeste partitcipation.
    Nicole Garnier
    PS : j’ai mis mal-voyants et pas mal-voyantes, on a du mal à changer les habitudes

    • merci pour ce commentaire
      personnellement je pense que le langage est le reflet de la société et que ce n’est pas en rendant les textes illisibles qu’on réglera les problèmes d’équité. Au contraire pour moi ce type d’écriture a surtout pour effet de masquer, de faire croire qu’on fait quelque chose.
      Après je ne suis pas opposé à une écriture inclusive lisible comme je l’ai dit, au contraire, j’essaie moi-même de l’utiliser le plus possible.
      Mais en priorité il faut casser les plafonds de verre, mettre les salaires à égalité etc. Agir « pour de vrai »
      merci encore

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